Imaginaire sous le suaire

March 13, 2015 dans News


« DÉSORMAIS, SIR TERRY, NOUS DEVONS MARCHER ENSEMBLE », a dit la Mort, jeudi 12 mars 2015, en début d’après-midi (et quelqu’un l’a fort opportunément retranscrit sur le compte Twitter de l’auteur.)
Puis plus tard : « Terry a pris le bras de la Mort et l’a suivi à travers les portes et dans le désert noir sous la nuit éternelle. » Avant, un dernier message : « THE END ».
Les fans de Terry Pratchett sont orphelins. Une bouffée de panique a dû les envahir à cette annonce, j’ai suffoqué. L’histoire du Disque-Monde s’arrête là. Oooooook ! Je n’aurai jamais la chance de le rencontrer.
Si Tolkien m’a donné envie d’écrire de la fantasy, Terry Pratchett m’a montré la manière d’y parvenir. Je me rappelle tout aussi bien mon émerveillement à la lecture du Peuple du tapis que de mon incrédulité. « Ah bon ? A-t-on vraiment le droit d’écrire ainsi, d’être aussi drôle ? » Il y avait forcément une loi quelque part, rédigée par des gens de lettres imbus de leurs propres mots, pour l’interdire. Incroyablement, non.
Terry Pratchett a donc libéré ma plume et il entretient cet état de grâce à chaque lecture ou relecture.
Quand mon premier roman a été publié de manière cryptique, malgré son indigence éditoriale, malgré ma maladresse de débutant, il a su enthousiasmer nombre de ses lecteurs. Peut-être même un peu trop puisqu’un commentaire posté sur un forum me décrivait comme « le successeur de Terry Pratchett ». Commentaire auquel on répondit : « Hérésie. » Je ne peux qu’être d’accord, tant pis pour mon orgueil. Personne ne peut décemment se prétendre le successeur de cet écrivain aussi drôle, observateur, magicien qu’humaniste. Sauf à oublier de prendre ses pilules.
Je préfère croire que Terry Pratchett laisse des héritiers, une multitude, durant des générations, tout comme Tolkien continue d’inspirer.
Dans ma peine, je me réjouis que Sir Terry ait connu une fin paisible chez lui, avec son chat, entouré par sa famille, conscient de l’amour des siens, conscient de l’amour que lui portent ses millions admirateurs. Ses héritiers, ses livres, lui vaudront l’immortalité de son souvenir.

Deux semaines plus tôt, le 27 février précisément, une autre part de mon imaginaire disparaissait avec la personne de Léonard Nimoy. Le grand rôle de sa vie, pour le pire et le meilleur, était celui de M. Spock, l’officier scientifique à demi-vulcain de Star Trek. Il était mon personnage préféré de la série classique avec le Dr McCoy. Sa logique, sa prise vulcaine, ses pouvoirs m’ont émerveillé étant enfant. Plus tard, j’ai pu apprécier la profondeur de ce personnage, la philosophie vulcaine, magnifique de tolérance, l’Idic (Infinie diversité en d’infinies combinaisons. Mon parcours scientifique ne lui est pas complètement étranger.
Par respect pour sa mémoire, ne me parlez pas d’ersatz abramsienne. Léonard Nimoy était Spock.

Fantasmes au bord d’une tourbière

October 8, 2011 dans Z'umeurs

Depuis un peu plus de deux ans, je m’offre régulièrement une “retraite vosgienne” à Gérardmer. Celle-ci consiste à mêler randonnées et écriture durant ce séjour. Quoique pas tout à fait dans le même temps, la première activité drainant trop de sang et de sucre pour tapoter un clavier. En revanche, l’inspiration vient facilement au cœur de ces forêts moussues. Peut-être même à cause de ce manque de sucre dans le cerveau.
Le choix d’un bon livre de chevet est primordial pour une retraite réussie. J’ai pris l’habitude de miser sur un Terry Pratchett ; Le cinquième éléphant ne me contredira pas. La musique n’est pas exclue de ces muses nécessaires ; dans la voiture avec quelques BO : Rango, Le 13e guerrier, Van Helsing, Pirates des Caraïbes, ou collé derrière l’ordi avec Le Retour du Roi (LOTR) ou Black Symphony (Within Temptation).
Restait à vivre, lors de mon dernier séjour, une expérience rêvée : écrire sous les arbres, au bord d’un magnifique lac – tourbière. Après une bonne heure de grimpette, j’arrive au lieu-dit de mes émois. La place est libre, la vue magnifique, le trop lourd portable vite déballé. La batterie compte ses 98 % de charge, les oiseaux gazouillent, mes doigts tapotent le clavier. Le bonheur. Fugace. Moins de dix minutes plus tard, cette odieuse machine s’éteint sans rémission. La batterie est vieille et ne sert visiblement plus à rien. Ça ne serait pas arrivé avec un carnet, hein ? Pff, et les pannes de stylo ? Quoi qu’il en soit, je n’allais pas laisser cette technologie défaillante me dicter sa loi. Je dégaine mon téléphone pour la faire taire et remercie secrètement la fée de la mousse pour ce clavier azerty. Ainsi s’est prolongé de quelques pages Fées à la chaîne…